Patate aux pinottes
En deux semaines, je suis passée de co-skipper à maraudeuse… Co-skipper dans la régate Fémina ; il s’agit de la seule régate au Québec dont les équipages ne sont que féminins. Elle se tient le samedi 9 juillet 2016 et le parcours représente une boucle Lévis-Neuville-Lévis. En fait, j’accompagne l’équipage d’un Bénéteau 36 pieds dont la propriétaire n’a jamais fait de régate… c’est mon cas également, je le rappelle. L’organisatrice s’est donc dit que nous ferions la paire. Je suis hyper excitée et morte de trouille. Pour ce qui est de l’épithète de maraudeuse, elle me vient du gestionnaire du forum Voile abordable. Dans sa littéralité, marauder signifie voler des produits de la ferme. Je ne pensais qu’à la carte du maraudeur des jumeaux Weasley où il faut jurer solennellement que nos intentions soient mauvaises pour avoir accès au plan détaillé de Poudlard. Mais qu’ai-je fait pour mériter d’être ainsi insultée ? — avec un ton d’incrédulité dans la voix… hein moi voler ?! Voler quoi ?! Je souhaitais tout simplement répondre au message d’un papa d’une jeune famille. Ils partent en voilier aux Bahamas, cette année, de Québec. Il y a tellement peu de familles, encore moins avec de jeunes enfants, que l’idée d’avoir un bateau copain à l’équipage plus ou moins similaire est très séduisante. En invitant ledit papa à entrer en communication directement avec moi, j’ai « volé » dans la ferme de Voile abordable. Le gestionnaire a bloqué mon message et, en plus, il ne s’est pas gêné pour me traiter de nom (un gestionnaire de forum antisocial, c’est assez étrange, non ?). Petite famille sur la ligne de départ, ce n’est que partie remise. D’ailleurs, au sujet des gens qu’on rencontre dans un voyage au long cours, la palme de la poésie revient à Laurent. Oui, j’ai bien dit Laurent. Pour me calmer de m’être faite ainsi envoyer paître (dans une ferme), il me dit avec un grand sourire que la beauté du voyage, c’est justement de ne pas savoir qui tu vas rencontrer en chemin. Au reste, on a fait la connaissance de Sylvain et de sa femme qui partent du lac Champlain sur leur voilier pour 2 ans ! Super gentil, il nous a proposé de prendre un café pour discuter de la route à suivre jusqu’aux Bahamas. Leur voilier est tout juste derrière le nôtre dans la cour de la Marina Gosselin. J’ai pris soin de leur donner nos infos, c’est toujours plus facile de se retrouver par la suite. Hier soir, en rentrant du voilier, Laurent me dit qu’il a reçu en plein dans la tronche l’eau des pâtes que la femme de Sylvain (il faut vraiment apprendre son nom) a viré par-dessus bord ! J’ai tellement ri que j’ai presque réveillé Aymeric.
Patates aux pinottes
(qui aurait cru, d’ailleurs, qu’en québécois, arachide s’écrive pinotte)
On n’a pas d’électricité. Dans la panoplie des trucs à faire sur Trello, refaire le circuit électrique est en tête de liste. Je mets en photo le schéma de Laurent, c’est quelque chose. Mon chum (quelques fois, c’est mon conjoint, ou bien mon mari, quand l’humeur me prend), je le trouve vraiment sexy. Là, habillé en chienne à Jacques, les yeux brillants, il me parle de sa réflexion du moment pour résoudre le branchement en parallèle des quatre batteries (deux sous notre lit et deux dans le coffre arrière tribord) et je craque. Intelligent, très bel homme et en plus apprenti bricoleur manuel. Qu’est-ce que je disais encore ? Ah oui, la cuisinière au propane est équipée d’un système électrique qui empêche la fuite de gaz lorsqu’elle n’est pas utilisée. En fin de semaine, Laurent réussit donc à nous brancher un truc broche à foin juste pour l’occasion et nous avons de l’électricité ! Je prépare le poulet pour le BBQ et je me rends compte que, dans notre départ hâtif de la maison, j’ai oublié le beurre et l’huile d’olive pour cuisiner. Merde ! Laurent me regarde à la lueur de la lampe à l’huile, un sourire en coin : « nous avons du beurre de pinotte croquant ». Sitôt dit, sitôt fait. Le hic, c’est que je mets du sucre sur mon beurre de pinotte le matin.
J’ai commencé la liste des travaux du printemps, hourra! En frottant le pont à quatre pattes (j’imagine bien la vue, trois mètres plus bas), je suis parvenue à lui redonner la blanche splendeur de sa jeunesse. En même temps, j’ai réfléchi à mon stratagème guerrier… La prochaine bataille contre le chauffe-eau sera décisive. Dans mes tribulations, j’ai chargé ma collègue Carolle, qui a travaillé autrefois chez Wolseley et qui détient son cours de plomberie, de nous retrouver le joint du chauffe-eau de la muerte. Elle a réussi après 2 semaines de recherche ! Bon, je n’ai eu la nouvelle que lundi et je suis passée à l’attaque samedi pour traquer l’animal. Le hibou de la mort est donc enduit d’un scellant form-a-gasket noir qu’on laisse sécher toute la semaine. Le verdict sous peu.