La communauté

La communauté à laquelle je pense, c’est celle de Tonnies, l’un des pères fondateurs de la sociologie (parmi la bande de vieux schnocks barbus), c’est-à-dire un espace relativement restreint où les gens se côtoient quotidiennement, en face à face et où ils entretiennent des relations amicales, voire familiales. Qu’est-ce qui me prend ? Outre un certain besoin réprimé de sociologiser, c’est que jamais je n’aurais cru adorer la campagne québécoise, moi qui déteste la banlieue.

La communauté, celle dans laquelle on vit depuis 2 mois, c’est sans contredit la communauté des gens du voyage (niaisée par les copains dont les bateaux sont déjà dans l’eau, alors que les nôtres sont au fond de la cour), en perpétuelle préparation pour le grand départ. C’est aussi celle de chez Gosselin que l’on fréquente assidument, avides de conseils (Laurent me fait d’ailleurs remarquer que l’on perd une heure tous les matins à bavarder avec Yann, Michael ou bien Stéphane). Le tout se déroule dans la capitale nautique du Québec, Saint-Paul-de-l’Île-aux-Noix. Aymeric, Laurent et moi avons chacun nos spots. Tour de vue de l’endroit et de ses habitants.

Marina Gosselin

Au fond de la cour

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Foret de mâts, vue de notre cockpit, un jour de brume
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Peanut qui conduit son camion-grue, vue de notre cockpit. Derrière, les entrepôts et le garage.
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La cour arrière vue du magasin

Dorénavent est situé dans le chantier maritime, juste devant les entrepôts et les garages, lieux de travail des gars de la cour. Ce qui fait que maintenant, on est presque des leurs. Un petit hochement de tête au passage, un coucou après le quart de travail. D’ailleurs, on ne manque jamais de nous dire « pis, c’est quand qu’on le met à l’eau, ce bateau là »; « Arrêtez de le frotter, il n’y aura plus de gel coat ». La meilleure, à Laurent « J’espère que tu l’as mariée c’t’e femme là ! (je savonnais la coque en bikini) ». Au magasin, Lucie et Linda donnent des bonbons à Aymeric qui ne manque jamais d’aller les voir. Élise, la déesse de l’entretien des bateaux, en a profité cette semaine pour nous faire visiter son cruiser, Mariloup, et v’là Stéphane, conseiller technique, qui fait le con. Dans notre petit espace, on a rencontré Daniel et sa femme, de Guyanne, qui ont fait les Bahamas et qui partagent leur expérience avec Laurent (un Laurent transformé. C’est la première fois qu’il parle tellement que son interlocuteur doit se sauver). Avant, au printemps, c’était Sylvain et sa femme qui étaient derrière nous. On doit les retrouver sur le lac Champlain ou bien dans l’Intracostal.

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Élise dans son super cart de golf.
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Stéphane

Et on a eu de la visite ! Surprise un beau matin, ma copine Stéphanie qui fait sa thèse de doc en Uruguay et son mari Pedro passent nous voir et kidnappent Aymeric pour un avant-midi. Merci. Seb et Karine se sont fait le plaisir de nous aider à poncer, mouhahaha. Nos premiers invités en annexe, Philippe et Gigi, de la famille du côté de Gracefield que l’on retrouvera aussi aux Bahamas. Et puis la fin de semaine dernière, j’entends cogner (c’est la nouvelle sonnette). Je sors ma tête, jette un coup d’œil en bas, pour voir… Sylvette, ma collègue fonctionnaire du 10e étage. Je suis estomaquée. Premiers à nous avoir envoyé un courriel sur l’adresse du blogue, ils sont venus nous voir et jaser voilier. Luc, son conjoint, a déjà retapé un Hunter. Laurent prend plaisir à lui faire faire le tour de nos rénovations.

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Pedro et Aymeric au fort Lennox.
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Philippe et Gigi dans leur annexe.
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Sylvette et Luc, un beau matin.

Au fin fond de la cour, Sylvie et Justin colmatent, réparent et sauvent le Maitre D, un Endeavour 43 de 1977 qui vient de passer les 12 dernières années en cale sèche. C’est un projet de restauration assumée! Sylvie possède une aura mystérieuse ; d’aucuns disent qu’elle est franco-ontarienne. Au début du mois de juillet, lorsque je suis arrivée, Laurent les surnommait les granos. Au fil du temps, on s’est apprivoisé. Sylvie et Justin font partie de ces gens que l’on n’aurait jamais pu rencontrer en temps normal, dans notre quartier ou bien au boulot. Sous son chapeau de cowboy, elle est artiste, frôle l’âge mûr et possède une sensualité envoutante. Merci, Sylvie, pour ce petit coup de pouce ; je ne suis plus qu’une fonctionnaire respectable, je suis une femme en bikini qui se sent vachement sexy. Justin, américain, doit bien avoir notre âge (toujours des ragots dans la cour). Il travaille comme infirmier et comme skipper. Après quelques rencontres à la piscine ou bien à l’apéro (des paumés du fond de la cour), il me dit, en anglais bien sûr : « tu es Française, tu as fréquenté une école privée (ce qui explique mon niveau d’anglais et mon conservatisme) et tu es la bénéficiaire d’un legs en fidéicommis (trustfund baby, ses mots précis). C’est pour ça que vous êtes riches et que vous partez en voilier ». Dans les dents le retour du jugement! À côté d’eux se trouve le Marphat F II, à bord duquel Simon et Vicky rêvent de partir pour le sud. Entre Daniel (le gars du catamaran) et le Maitre D, on ne sait pas ça fait combien de temps que le gars est venu voir son bateau…

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À la fête de Daniel, Sylvie nous fait un spectacle de feu!

 

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Justin
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Sylvie
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Le bateau fantôme du fond de la cour.

La bande des quais

Sur les quais se retrouve une bande de nouveaux copains qui, comme dans un camping de tentes-roulottes sédentaires, se rencontrent et s’entraident tout en célébrant le Noël du campeur. Pierre et Lucie vivent les balbutiements de la vie dans un bateau. Ils sont propriétaires d’un cruiser de 42 pieds surnommé tendrement Bleu nuit (oui, oui. Pour ceux qui l’ignorent, Bleu nuit est le nom de l’une des émissions de cul les plus populaires au Québec dans les années 90). D’ailleurs, quand Pierre m’a dit, « mais qu’est-ce que tu veux que je fasse (en parlant du nom de son bateau) », Laurent lui a répondu « tourner des films xxx ». Derrière, Jean possède deux voiliers, un Hunter 36 pieds, Lady Denyse, ici chez Gosselin et un deuxième voilier aux États-Unis. Il doit combattre une force absurde dédoublée, à 70 ans, pas facile. Richard, tout juste à côté, retape le Black velvet, voilier de 43 pieds, cockpit central. Tout ce beau monde se rencontre à la piscine pour échanger les derniers potins, des outils, de la bouffe.

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Lucie et Aymeric
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Pierre
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Jean et Richard

Saint-Paul-de-l’Île-aux-Noix

Yann, Émilie, Maxime et Zoé habitent Saint-Paul. En ce moment, ils retapent leur maison. On a des amis et des locaux en plus avec qui faire des barbecues et jaser de la différence entre le Québec et la France ! Tout près de chez eux, derrière les pompiers, se trouve le parc. Quand Aymeric n’en peut plus, quand il veut courir, ça devient notre lieu de prédilection. Le spot pour Aymeric et Laurent ; le premier s’amuse dans les glissades, le second fait du cerf-volant. Pas trop loin, l’Échalote, où on achète notre maïs cueilli le matin même (c’est l’extase) et le bar laitier (avec la jolie grand-maman) et son parc de jeu. Mon spot, c’est maintenant au salon chez Marie. Un jour où je n’en pouvais plus de me sentir laide, habillée en vêtement de chienne à Jacques, j’ai demandé à Stéphane où sa femme se faisait couper les cheveux. Comme je l’ai rencontré lorsque je suis allée porter Aymeric chez Stéphane pour que ses filles le gardent, je savais que je n’avais rien à craindre. Chez Marie it is. C’est ma première expérience dans un salon à domicile, surtout l’un où une croix (du type Jésus) est à poste au-dessus de la porte. Au lieu de m’offrir un cappucino, Marie me parle des hurlements d’un lièvre qui s’est fait chopper par un aigle (une chouette) et de sa chair de poule quelques nuits passées. C’était magique et en plus, c’est l’une de mes meilleures coupes de cheveux.

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L’Échalote et son maïs!
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Aymeric au parc derrière les pompiers.
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Le super parc de jeu derrière le bar laitier, affectueusement nommé le parc de la crème glacée par Aymeric.
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Au terrain de soccer, en pleine action « cerf-volant ».